AG du 4 Décembre 2014: qu’est-ce que croire? Réponses du Notre Père.

 

Lors de l’assemblée générale du 4 décembre 2014, Marie-Christine MICHAU a présenté l’ouvrage intitulé « Qu’est-ce que croire? Réponses du Notre Père ». Ci-dessous, le texte de son exposé.

 

Qu’est-ce que croire ? Réponses du Notre Père

Racines et chemins-AG-4 décembre 2014-Marie-Christine Michau
Labor et Fides, 2014 ; 268 p., 25 €.

 

Introduction

On m’a demandé de vous dire quelques mots d’un livre à la rédaction duquel j’ai participé, une grande aventure. Il est paru en septembre 2014 sous le titre Qu’est-ce que croire ? Réponses du Notre Père chez Labor et fides, un éditeur suisse protestant d’ouvrages en langue française. Il a paru simultanément en allemand (Rede und Antwort stehen-Glauben nach dem Unservater) chez un éditeur zürichois.

En effet, le petit groupe de 6 théologiens qui l’a rédigé a travaillé à Berne à la demande de la Fédération des Eglises Protestantes Suisses qui souhaitait disposer d’un « livre de la foi », autrement dit d’un exposé actuel de la foi chrétienne dans la sensibilité réformée suisse.

Ce manuel s’adresse également à toute personne désireuse de dialoguer sur les expressions contemporaines de la foi ainsi qu’à celles qui veulent se renseigner sur la prière la plus célèbre de la Bible.

Les auteurs

Vous vous demanderez peut-être, comme moi, ce qu’une luthérienne française, plutôt branchée, dans ses travaux de thèse, sur le Premier (ou Ancien) Testament, et pas vraiment bilingue, allait faire chez les Suisses réformés par Calvin et Zwingli dans le commentaire d’un texte du Nouveau Testament ! Les voies de Dieu sont impénétrables ! Mais je Le remercie, car j’ai trouvé ce travail qui a duré 18 mois, très intéressant dans une équipe où mes particularités linguistiques, culturelles et théologiques ont été bien acceptées. J’espère qu’elles ont enrichi notre travail. En tous cas, j‘ai bien apprécié ces échanges, voire ces confrontations, ces explications que nous avons dû nous donner mutuellement pour savoir d’où chacun parlait et d’où lui venaient ses expressions de la foi parfois si insolites !

Nous étions une équipe de 6, plus un chef de projet : 4 hommes et 2 femmes, 3 germanophones et 3 francophones, de 40 à 64 ans au début du travail. Les 2 autres francophones, parfaitement bilingues eux, venaient à mon secours quand le besoin s’en faisait sentir. Chacun parlait, travaillait, écrivait dans sa langue… et devait donc écouter, lire, comprendre les propositions faites dans l’autre langue. Une jolie gymnastique intellectuelle à laquelle nous ne sommes guère habitués nous Français, mais qui fait partie du quotidien pour beaucoup de Suisses. A ma connaissance, il n’est pas encore prévu d’édition en italien ou en romanche…

Qui étaient ces 6 ouvriers ? 3 professeurs des Facultés de théologie de Bâle, Berne et Zürich, enseignants de théologie systématique (c’est-à-dire de dogmatique, de philosophie ou d’éthique) ; un doctorant en théologie déjà docteur en sciences agronomiques et 2 femmes aux titres moins prestigieux, mais qui ne se sont pas laissé intimider : une pasteur de Zürich retraitée depuis peu et moi.

La méthode de travail

Nous avons pris comme point de départ le texte de la version liturgique œcuménique de 1966, tout en ne perdant pas de vue les versions de Matthieu et de Luc dans leurs évangiles. Après des discussions sur le but du travail, les contenus théologiques sur lesquels nous voulions insister, nous nous sommes répartis le travail pour chacun des chapitres correspondants aux 11 parties identifiées dans le Notre Père : 7 demandes, plus l’invocation du début (Notre Père qui es aux cieux), le complément de la 5° demande (comme nous pardonnons aussi à ceux qui nous ont offensés), la doxologie (Car c’est à toi qu’appartiennent le règne, la puissance et la gloire) et l’Amen final. Chacun écrivait un chapitre dans sa langue et l’envoyait pour une première lecture à un théologien de l’autre langue qui faisait une première série de remarques que l’auteur prenait en compte. Les échanges par internet étaient nombreux et chacun pouvait ainsi s’approprier le travail des autres. Des réunions à Berne permettaient ensuite de discuter des points restés en suspens et d’harmoniser nos textes. Préface, introduction, épilogue ont suivi. Les traductions ont ensuite été réalisées par des professionnels et la totalité relue par des personnes extérieures à notre groupe pour en améliorer la compréhension.

Le choix du Notre Père

Comment présenter aujourd’hui les grands principes de la foi chrétienne sans être assimilé à un passé poussiéreux ou à des formes radicales et autoritaires de la religion contemporaine ?

Nous avons choisi de commenter les paroles universelles de la plus célèbre prière de la Bible, le Notre Père, dont les spécialistes font remonter l’origine à Jésus lui-même, une prière commune à tous les chrétiens. C’est un des rares textes traditionnels de la foi chrétienne qu’aujourd’hui encore la plupart des personnes dans l’Eglise savent par coeur et qui est aussi largement connu au-delà du cercle de l’Eglise. Une familiarité spontanée peut ainsi être supposée comme point de départ. Il est en outre indéniable que le Notre Père a participé à forger l’empreinte chrétienne de notre culture, ancrage que nous avons cherché à valoriser. Au fil des onze chapitres, le commentaire est l’occasion d’aborder les grands thèmes de la foi chrétienne et de faire quelques références aux théologies réformées.

Le livre débute par la présentation du contexte de cette prière, de ses sources juives, de certaines particularités de son usage dans la tradition chrétienne. Puis chaque chapitre commence avec une courte introduction sur une des questions fondamentales du christianisme suggérée par la demande en question. Elle est toujours suivie d’une explication ou d’un commentaire pour une meilleure compréhension de l’intention de prière dans son contexte historique et actuel. D’autres textes, bibliques ou extra-bibliques, sont aussi cités, généralement dans des encadrés ; ils donnent un écho plus large à la demande étudiée, nous permettent d’en prendre distance et de réfléchir aux enjeux de cette demande. La partie conclusive du chapitre fait le lien entre ces affirmations et la vie quotidienne pour montrer de quelle manière elles peuvent être pertinentes pour la vie de foi, quelles conséquences existentielles et éthiques elles peuvent avoir. Ce ne seront pas des réponses définitives, plutôt des pistes pour une réflexion personnelle sur la foi, une réflexion qui soit ancrée dans la vie.

Le livre

La première phrase (Notre Père qui es aux cieux) permet de réfléchir à ce que veut dire prier et aussi aux qualificatifs attribués à Dieu, à sa paternité (et à sa maternité). Cette interpellation nous place aussi dans une communauté fraternelle.

Que ton nom soit sanctifié : ce chapitre s’interroge sur la façon dont nous pouvons parler de Dieu, du baptême et de la Trinité.

Que ton règne vienne se penche sur nos insatisfactions dans ce monde, sur nos espérances, sur notre attente d’un monde meilleur.

Que ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel est l’occasion de revenir sur les Dix Paroles (ou Dix commandements), sur le double commandement d’amour (Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme et de toute ta pensée et Tu aimeras ton prochain comme toi-même) et sur le la relation entre liberté humaine et volonté de Dieu.

Donne-nous aujourd’hui notre pain de ce jour interroge sur ce qui nous fait vivre, sur la providence et sur l’eucharistie.

Pardonne-nous nos offenses aborde les difficiles questions de la dette, du péché, de la culpabilité et du pardon ; questions prolongées dans Comme nous pardonnons aussi à ceux qui nous ont offensés.

Ne nous soumets pas à la tentation, nous parle des combats de la vie et Délivre-nous du mal pose la grande question : « Pourquoi Dieu ne déploie-t-il pas toute sa puissance contre le mal ? ».

Car c’est à toi qu’appartiennent le règne, la puissance et la gloire, termine la prière par une action de grâce.

L’Amen final qui signifie « c’est vrai » manifeste notre oui à Dieu et nous associe à la communion de tous les chrétiens qui, dans leurs langues diverses, se rattachent au « Notre » et aux « nous » de la prière.

Conclusion

Ce livre offre une interprétation théologique capable de satisfaire la curiosité de personnes intéressées par le message du Nouveau Testament ou par la foi chrétienne et peut servir pour une réflexion en groupe.

Complément : Quelle version liturgique du Notre Père à l’avenir ?

Certains d’entre vous ont peut-être déjà vu la nouvelle traduction liturgique pour les lectures de la messe catholique, parue en 2013. La version du Notre Père diffère de celle que je vous ai présentée à la 6° demande et Ne nous soumets pas à la tentation devient « ne nous laisse pas entrer en tentation ». Cette traduction deviendra peut-être la version de la prière liturgique catholique en 2016. Du côté protestant, l’adoption de cette nouvelle traduction est en cours d’étude.

Pour ma part, j’espère que nous conserverons une version commune entre catholiques, protestants et peut-être orthodoxes. C’est un beau témoignage d’œcuménisme et de fraternité que de prier ensemble !

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